Dimension humaine et sociale de l’islam (Jamel Khermimoun)
L’islam lie la foi en Dieu à la bonne œuvre, à une présence positive au cœur de la société. Le don, dans sa compréhension globale, guide l’action du fidèle : « La piété ne consiste point à tourner vos visages du côté du levant ou du couchant. Pieux est celui qui a foi en Dieu et au jour dernier, aux anges et au livre, aux Prophètes ; qui, pour l’amour de Dieu, donne de son avoir à ses proches, aux orphelins, aux pauvres, aux voyageurs et à ceux qui demandent ; qui rachète les captifs ; qui observe la prière ; qui fait l’aumône ; qui remplit les engagements qu’il contracte ; qui est patient dans l’adversité, dans les temps durs et dans les temps de violences. Ceux-là sont justes et craignent le Seigneur » (sourate II, verset 177). « L’entraide, l’hospitalité, la générosité, la fidélité aux engagements, la sobriété, vertus universelles, prônées par l’islam et que ne nie pas l’auteur, n’ont pas pour moteur un appareil juridique sans âme. Agir pour Dieu, par amour pour lui, donc pour l’homme, est l’essence du message de l’islam, sa substance et son plus noble dessein » (Khermimoun, 2011).
Pour Dominique Sourdel, « la vie sociale est fondée sur la notion de « communauté » (Oumma), qui subordonna groupements tribaux et ensembles nationaux ou raciaux à un principe supérieur, celui de la fraternité et de l’égalité absolues entre adeptes d’une même foi (« Les croyants sont tous frères », sourate 49, verset 10). Les liens de solidarité ne furent pas brisés par les schismes politico-religieux : en tant que « gens de la qibla », chiites, kharijites, sunnites font également partie de la communauté ».
La justice sociale constitue une des valeurs qui tiennent une place centrale en islam.
Concernant le mariage, la règle en islam est la monogamie. En islam, l’adoption d’un comportement modèle au sein de la sphère familiale est tributaire des liens de compassion et d’amour mutuel qu’auront su instaurer au sein du couple les deux conjoints. La vie de famille ne s’oppose pas au chemine- ment spirituel. Celle-ci est au contraire une sphère à part entière de la spiritualité où s’exprime pleinement la reconnaissance à Dieu au quotidien, et un terrain sur lequel se forge l’éducation par l’amour, la patience mutuelle et l’effort continu au service de l’autre. L’autocritique constructive et la patience mutuelle sont un des piliers de la vie de couple. Une relation d’amour, au sein de laquelle l’intérêt porté au conjoint et la préservation de ses droits sont un fondement, doit se substituer à une relation basée sur les intérêts personnels de chacun. Le Prophète de l’islam est décrit par ses contemporains comme un époux modèle, accessible, tendre et affectueux envers ses enfants, responsable et entièrement dévoué au service de sa famille. L’islam définit clairement la teneur de toute union conjugale aspirant à une entente harmonieuse et dynamique : tisser des liens de confiance immuables, par la présence à Dieu, le dialogue perpétuel, l’estime mutuelle, la proximité et l’écoute, l’entraide, le dévouement, la patience face aux épreuves de la vie et face aux imperfections de l’autre (Khermimoun, 2011).
L’islam accorde une place particulière à l’éducation des jeunes générations. Elle est sous-tendue par les valeurs d’amour, de respect, de partage, d’entraide. « L’enfant est un être fragile de par sa constitution (physique et psychique) mais aussi parce qu’il est une personnalité en devenir. L’islam attache une importance toute particulière à l’enfant et à son éducation car il représente pour les parents un dépôt de Dieu que seul un enseignement par l’amour, l’éthique, la morale et la sagesse peut préserver. Dans le for intérieur de chaque individu, siège dès la naissance la foi en Dieu, au monde invisible (fitra). Cette foi originelle, immaculée, est très tôt mise à l’épreuve par l’éveil du moi, dès l’âge de trois ans, qui se traduit par une volonté d’affirmation de la personnalité vis-à-vis des autres. À cet âge, l’enfant vit une première « crise d’opposition », il découvre qu’il a la possibilité de dire « non ». La pensée égocentrique naît ainsi en lui. Cet individu accompagné dès la naissance par un entourage familial protecteur et empreint naturellement d’amour pour lui, va très vite être confronté aux difficiles réalités de la vie et à un environnement social, économique et culturel en perte de repères, de plus en plus hostile et agressif. L’enfant s’imprègne très tôt de ce qui l’entoure : l’école, les camarades, le voisinage, la rue, la télévision, l’internet ; autant de facteurs qui contribuent à l’éducation. L’enfant n’est donc pas exclusivement le fruit d’une éducation parentale bien attentionnée » (Khermimoun, 2011). La mère joue un rôle central en termes d’éducation dans nombre de civilisations. L’islam la considère comme la garante de la stabilité de famille et de la transmission d’une éducation équilibrée.
Jamel Khermimoun, chercheur au CERII.